
Témoignage de Laurie
« C’est avant tout un témoignage sur le post-harcèlement scolaire et l’hypersensibilité que je souhaite vous partager.
C’est dès la 6ème que j’ai commencé à subir de nombreuses moqueries à répétition, notamment sur mon physique, des mots forts, une réputation qui s’est étendue à l’échelle d’une ville… Tout çà a duré toute la période du collège, dans deux collèges différents. Je pense aujourd’hui que ma personnalité était la source de tout ça, j’étais gentille, je riais de mes propres blessures, des moqueries, de la méchanceté de tout. Comme si je voulais me persuader à moi-même que tout çà n’avait pas de réelle importance. Après tout, çà me paraissait tellement hors du monde. Je pense que la gentillesse peut se payer cher pendant l’enfance. Je n’en parlais à personne, je pense que plus le temps passait, plus la douleur devenait normalité à mes yeux : le bonheur n’était qu’un rêve inaccessible et le serait toute ma vie.
Ces expériences ont laissé en moi de nombreuses blessures. J’ai ainsi continué ma route le cœur à vif. En apparence, je suis toujours restée souriante, rigolote, présente pour mes ami(e)s… Rien ne pouvait laisser penser que ma vie était dominée par de nombreuses peurs. La peur d’aimer, la peur d’être aimée, la peur du monde, le dégoût même. Un dégoût pour ce monde et pour les gens. Je ne voulais plus faire d’efforts pour comprendre le monde et les gens qui étaient pour moi, beaucoup trop cruels. Souvent je m’appelais « le poison », à mes yeux, je n’étais qu’un poison pour moi-même et pour les autres. Ma vie n’avait pas de sens. Lorsque je pensais à mon futur, les images dans ma tête étaient floues. J’avais l’impression d’être une bombe à retardement. Que ce serait-il passé si j’avais attendu l’explosion finale ?
Mais heureusement pour moi, ce n’est pas arrivé. Grâce à une personne que j’ai rencontrée et qui a su voir le mal-être au-delà du sourire. De là s’en est suivi plusieurs discussions, déclics, douleurs aussi, remontées à la surface. Cela fait maintenant un peu plus d’un an que je travaille sur moi pour me comprendre, me faire confiance, et apprivoiser mes peurs. C’est un travail immense que d’apprendre à se connaître et à se faire confiance lorsque, pendant plusieurs années, notre vie a été guidée et bâtie par de la peur. C’est toute une muraille qui s’effondre.
En tant que personne hypersensible, j’ai toujours senti que mon monde était en décalage par rapport à ceux des autres, je ne comprenais pas certains mots, certaines réactions, certains gestes. Et mon hyper-empathie a toujours cherché à aller au-delà de cette incompréhension : comprendre l’autre a été l’une de mes missions principales pendant mon enfance. Je ne remettais pas en question leur attitude. JE n’étais pas normale, JE n’avais aucune importance, JE ne méritais pas d’être là, JE LE MERITAIS.
Aujourd’hui, j’ai à cœur de guider les enfants dans cette épreuve, de leur faire prendre conscience de l’impact que peuvent avoir de simples mots ou gestes. Chaque instant de notre vie est précieux, et personne ne mérite qu’on le lui vole.
Si je peux faire gagner quelques années de soulagement à ne serait-ce qu’une personne, ce serait à mes yeux la plus belle des victoires. »